Règlement grand-ducal du 2 octobre 1992 relatif à la création et à l'exploitation d'une banque de données nominatives de police générale.

Nous JEAN, par la grâce de Dieu, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau;

Vu l'article 12-1 de la loi du 31 mars 1979 réglementant l'utilisation des données nominatives dans les traitements informatiques telle qu'elle a été modifiée;

Vu les avis de la commission consultative prévue à l'article 30 de la loi du 31 mars 1979 précitée;

Notre Conseil d'Etat entendu;

Sur le rapport de Notre ministre de la Force publique, de Notre ministre ayant dans ses attributions le répertoire national des banques de données et de Notre ministre des Communications et après délibération du Gouvernement en conseil;

Arrêtons:

Art. 1er.

Pour les besoins de la prévention, de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions, la gendarmerie et la police sont autorisées à créer et à exploiter en copropriété et sous l'autorité du commandant de la gendarmerie et du directeur de la police une banque de données nominatives.

Art. 2.

(1)

La banque de données est divisée en trois parties:

La partie recherche de personnes et d'objets qui est accessible aux agents de la gendarmerie et de la police.

La partie documentaire qui est accessible aux chefs de corps de la gendarmerie et de la police et aux officiers de police judiciaire autorisés par eux à cet effet. Les autorisations sont temporaires et révocables.

Une liste des agents autorisés à consulter cette partie de la banque de données est communiquée au procureur général d'Etat.

La partie archives qui n'est accessible que de l'accord exprès du procureur général d'Etat ou du membre de son parquet désigné à cet effet.

(2)

Lors de chaque consultation d'une des trois parties de la banque de données, le nom de l'agent qui a procédé à l'interrogation ainsi que le motif de l'interrogation doivent être enregistrés.

(3)

Les données relatives à ces enregistrements ne sont accessibles qu'au procureur général d'Etat ou au membre de son parquet délégué par lui aux fins de contrôle qui lui est conféré par l'article 12-1, alinéa (4) de la loi modifiée du 31 mars 1979, ainsi qu'au commandant de la gendarmerie et au directeur de la police ou aux agents spécialement désignés par eux aux fins de contrôle interne.

(4)

Elles sont effacées si le procureur général d'Etat ou le membre de son parquet délégué par lui décide que l'utilité de leur enregistrement est devenue caduque.

Art. 3.

(1)

La partie recherche de personnes et d'objets de la banque de données contient les informations relatives:

aux personnes recherchées ou signalées par les autorités judiciaires luxembourgeoises;
aux personnes ayant fait l'objet d'une décision administrative dont l'inobservation constitue une infraction pénale;
aux personnes ayant fait l'objet d'un arrêté de refus d'entrée et de séjour au Grand-Duché;
aux personnes recherchées ou signalées aux autorités luxembourgeoises par des autorités judiciaires étrangères ou par l'Organisation Internationale de Police Criminelle (OIPC-Interpol) ou par des services de police étrangers dans le cadre d'une convention internationale ou d'un accord intergouvernemental;
aux personnes majeures ou mineures portées disparues;
aux personnes détenues dans un établissement pénitentiaire pour l'exécution d'une peine.

(2)

Sont enregistrées au sujet des personnes indiquées ci-avant les informations suivantes:

a) les noms, prénoms, sexe, nationalité, date et lieu de naissance, profession et adresse;
b) le numéro et la date du procès-verbal, du rapport ou du dossier avec l'indication de l'origine.

(3)

Sont en outre enregistrés:

a) pour les personnes visées sous 1o, 4o et 5o, l'objet de l'avis de recherche;
b) pour les personnes visées sous 1o et 4o, le mode d'opérer et le signalement descriptif;
c) pour les personnes visées sous 2o et 3o, l'objet de la décision administrative;
d) pour les personnes visées sous 6o, les décisions accordant un congé pénal, une suspension de la peine, une libération conditionnelle ou une libération anticipée;
e) pour les personnes visées sous 1o à 6o, le renvoi éventuel à une photographie ou à une empreinte digitale.

Art. 4.

Les informations relatives aux personnes visées sous 1o à 6o du paragraphe (1) de l'article 3 sont effacées dans les conditions suivantes:

pour les personnes visées sous 1o et 4o, lorsque l'objet de la recherche ou du signalement est atteint, ou que l'avis de recherche ou le signalement est rapporté.

Lorsque l'avis de recherche émane d'une autorité luxembourgeoise celle-ci doit examiner chaque année, sur la base d'une liste qui lui est soumise par les propriétaires de la banque de données, si les inscriptions datant de plus de trente mois doivent être maintenues;

pour les personnes visées sous 2o et 3o, lorsque la décision a été rapportée;
pour les personnes visées sous 5o, dès que la réapparition ou le décès de ces personnes a été signalé aux forces de l'ordre;
pour les personnes visées sous 6o,
a) en cas de congé pénal ou de suspension de la peine, au plus tard un an après leur enregistrement;
b) en cas de libération conditionnelle, dès que le délai d'épreuve est écoulé;
c) en cas de libération ancitipée, dès que la peine est prescrite.

Art. 5.

(1)

La partie documentaire de la banque de données contient les informations relatives:

aux personnes faisant l'objet d'un procès-verbal ou d'un rapport pour crime, délit ou contravention:
aux victimes d'infractions dont l'auteur n'est pas identifié;
aux témoins d'infractions dont l'auteur n'est pas identifié;
aux personnes faisant l'objet d'une mesure de protection pour autant qu'elles consentent expressément à l'enregistrement.

(2)

Sont enregistrées au sujet de ces personnes les informations suivantes:

a) les noms, prénoms, sexe, nationalité, date et lieu de naissance, profession et adresse;
b) la nature des faits faisant l'objet du procès-verbal ou du rapport et les suites judiciaires qui leur ont été réservées;
c) le numéro et la date du procès-verbal, du rapport, du dossier ou du document de collecte avec l'indication de l'origine;
d) les objets recherchés.

(3)

Sont en outre enregistrés:

a) pour les personnes visées sous 1o le mode d'opérer, le signalement descriptif avec renvoi éventuel à une photographie ou une empreinte digitale;
b) pour les personnes visées sous 2o, le cas échéant, la nature des objets recherchés;
c) pour les personnes visées sous 4o, les motifs, la portée et la nature de la mesure de protection.

Art. 6.

(1)

Les informations relatives aux personnes visées sous 1o, 2o et 3o du paragraphe (1) de l'article 5 sont retirées de la partie documentaire de la banque et transférées à la partie archives dans les conditions suivantes:

a) en cas de décision de non-lieu ou de décision définitive d'acquittement;
b) en cas de condamnation lorsque l'inscription de la condamnation est effacée du casier judiciaire;
c) en l'absence de décision judiciaire:
- si les faits constatés aux procès-verbaux ou rapports constituent des contraventions, deux ans après leur constatation;
- si les faits constatés aux procès-verbaux ou rapports constituent des délits, six ans après leur constatation;
- si les faits constatés aux procès-verbaux ou rapports constituent des crimes, dix ans après leur constatation.

(2)

Le procureur général d'Etat peut cependant autoriser la conservation dans la partie documentaire des informations relatives à des crimes et délits au-delà du délai indiqué, tant que la prescription de l'action publique n'est pas acquise.

Art. 7.

Les informations relatives aux personnes visées sous 4o du paragraphe (1) de l'article 5 sont effacées lorsque la mesure de protection est rapportée ou que la personne protégée demande l'effacement.

Art. 8.

(1)

La partie archives de la banque de données contient les informations y transférées conformément à l'article 6.

(2)

Ces informations sont effacées soixante ans après leur premier enregistrement dans la banque de données.

Art. 9.

(1)

Le Centre Informatique de l'Etat est chargé de la gestion de la banque de données.

(2)

Les données enregistrées dans la banque sont mises à jour moyennant communication de toute information utile contenue dans d'autres banques de données relevant de l'Etat, pour autant que ces communications aux forces de police et de gendarmerie sont expressément autorisées.

Art. 10.

La communication de données est autorisée

a) au sein des forces de police et de gendarmerie d'après les conditions à déterminer par le ministre de la Force publique, le commandant de la gendarmerie et le directeur de la police entendus en leurs avis;
b) aux ministères et administrations auxquelles les forces de l'ordre sont tenues de fournir des renseignements en vertu d'une disposition légale;
c) aux autorités judiciaires pour tout ce qui est de leur compétence;
d) à des services de police étrangers dans le cadre d'une convention internationale ou d'un accord intergouvernemental ou par l'intermédiaire de l'Organisation Internationale de Police Criminelle (OIPC-Interpol).

Art. 11.

La durée de validité de l'autorisation accordée en vertu de l'article 1er est fixée à 5 ans à partir de l'entrée en vigueur du présent règlement.

Art. 12.

Notre ministre de la Force publique, Notre ministre ayant le répertoire national des banques de données dans ses attributions et Notre ministre des Communications sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent règlement qui sera publié au Mémorial.

Le Ministre de la Force publique,

Jacques F. Poos

Le Ministre de la Justice,

Marc Fischbach

Le Ministre des Communications,

Alex Bodry

Château de Berg, le 2 octobre 1992.

Jean