Loi du 22 février 2004 instaurant un régime d'aide à la protection de l'environnement, à l'utilisation rationnelle de l'énergie et à la production d'énergie de sources renouvelables.

Nous Henri, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau,

Notre Conseil d'Etat entendu;

De l'assentiment de la Chambre des Députés;

Vu la décision de la Chambre des Députés du 27 janvier 2004 et celle du Conseil d'Etat du 10 février 2004 portant qu'il n'y a pas lieu à second vote.

Avons ordonné et ordonnons:

Art. 1er.- Objet - Champ d'application

Les ministres compétents peuvent accorder une aide en faveur d'opérations de protection de l'environnement et d'utilisation rationnelle de l'énergie réalisées par des entreprises industrielles ou de prestation de services, ces dernières devant avoir une influence motrice sur le développement économique.

Les ministres compétents peuvent en outre accorder une aide en faveur d'investissements destinés à la production d'énergie à partir de sources dites renouvelables réalisés par des entreprises de tous les secteurs constituées sous forme de société commerciale de droit luxembourgeois dans la mesure où leur activité afférente est exercée au Grand-Duché de Luxembourg et que le plafond total issu du cumul de l'aide à l'investissement avec des aides au fonctionnement octroyées à un même projet ne dépasse pas la limite introduite à l'article 5.

Les activités susceptibles de bénéficier des dispositions de la présente loi peuvent être précisées par un règlement grand-ducal.

Les entreprises des secteurs de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture ainsi que de la construction navale sont exclues du champ d'application de la présente loi.

Art. 2.- Définitions

1)

Opération de protection de l'environnement: toute action visant à prévenir, à réduire ou à éliminer une atteinte au milieu physique ou aux ressources naturelles ou à garantir une utilisation rationnelle de ces ressources ou à recycler les déchets générés par l'exploitation normale d'une entreprise.

2)

Opération d'utilisation rationnelle de l'énergie: toute action permettant à une entreprise de réduire de manière substantielle la consommation d'énergie nécessaire à son procédé de production ou à son exploitation.

3)

Sources d'énergie renouvelables: les sources d'énergie non fossiles et non nucléaires renouvelables, notamment éolienne, solaire, géothermique, hydraulique et la biomasse. Aux fins de la présente loi, on entend par biomasse tous les technologies et procédés disponibles pour produire de l'énergie à partir de la biomasse à l'exclusion de la biométhanisation.

4)

Electricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables: l'électricité produite par des installations utilisant exclusivement des sources d'énergie renouvelables, ainsi que la part d'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables dans des installations hybrides utilisant les sources d'énergie classiques.

5)

Norme communautaire: règle technique obligatoire dans l'Union européenne, fixant les niveaux de protection de l'environnement ou d'économies d'énergie à atteindre.

6)

Rendement de conversion: rapport entre, d'une part, la somme de l'énergie électrique produite et de l'énergie thermique produite et, d'autre part, l'énergie primaire nécessaire à cette production.

Art. 3.- Régime d'aide aux investissements de protection de l'environnement

Lorsqu'une entreprise relevant du champ d'application de la présente loi réalise un investissement afin de dépasser une ou plusieurs normes communautaires en matière de protection de l'environnement ou lorsqu'elle réalise cet investissement en l'absence de telles normes communautaires ou lorsqu'elle le réalise pour se mettre en conformité avec des normes nationales plus strictes que les normes communautaires, elle peut bénéficier d'une aide à l'investissement ne pouvant pas dépasser 30% des coûts éligibles.

Un plafond inférieur peut être défini par règlement grand-ducal.

Art. 4.- Régime d'aide aux investissements visant une utilisation rationnelle de l'énergie

Lorsqu'une entreprise relevant du champ d'application de la présente loi réalise un investissement en relation avec une opération visant une utilisation rationnelle de l'énergie telle que définie à l'article 2, elle peut bénéficier d'une aide à l'investissement ne pouvant pas dépasser 40% des coûts éligibles.

Un plafond inférieur peut être défini par règlement grand-ducal.

Art. 5.- Régime d'aide aux investissements de production d'énergie électrique à partir de sources d'énergie renouvelables

Lorsqu'une entreprise relevant du champ d'application de la présente loi réalise un investissement en faveur de la production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelables telle que définie à l'article 2, elle peut bénéficier d'une aide à l'investissement ne pouvant pas dépasser 40% des coûts éligibles.

Un plafond inférieur peut être défini par règlement grand-ducal.

Art. 6.- Régime d'aide aux investissements de production combinée d'électricité et de chaleur

Lorsqu'une entreprise relevant du champ d'application de la présente loi réalise un investissement dans une installation de production combinée d'électricité et de chaleur, elle peut bénéficier d'une aide à l'investissement ne pouvant pas dépasser 40% des coûts éligibles, à condition qu'elle puisse démontrer, soit que le rendement de conversion est particulièrement élevé, soit que l'investissement permet de réduire sa consommation d'énergie primaire.

Un rendement de conversion est présumé particulièrement élevé si l'installation de production combinée d'électricité et de chaleur à laquelle il se réfère permet d'économiser au moins 10% en énergie primaire par rapport à une production séparée d'électricité et de chaleur.

Un plafond d'aide inférieur peut être défini par règlement grand-ducal.

Art. 7.- Supplément en faveur des petites et moyennes entreprises

Les petites et les moyennes entreprises relevant du champ d'application de la présente loi qui réalisent un des types d'investissement tels qu'énumérés aux articles 3 à 6 peuvent bénéficier d'une majoration d'aide de 10 points de pourcentage en brut. Les définitions de petite et de moyenne entreprises sont celles résultant des dispositions communautaires en la matière.

Un taux de supplément inférieur peut être défini par règlement grand-ducal.

Art. 8.- Types d'investissements

Les investissements corporels visés par la présente loi sont ceux en terrains, en infrastructures, en bâtiments, en installations et en équipements dans la mesure où ils sont nécessaires en vue d'atteindre les objectifs tels que définis aux articles 3 à 6.

Sont également éligibles à une aide au sens de la présente loi, les investissements en actifs immatériels liés au transfert de technologies sous forme d'acquisition de licences d'exploitation ou de connaissances techniques, brevetées ou non, dans la mesure où ils satisfont aux conditions suivantes:

- constituer des éléments d'actif amortissables sur une durée d'au moins trois ans;
- être acquis aux conditions du marché;
- figurer à l'actif du bilan de l'entreprise bénéficiaire et être exploités par cette dernière pendant au moins cinq ans à compter de l'octroi de l'aide, sauf si l'entreprise bénéficiaire de l'aide peut démontrer qu'ils représentent des techniques manifestement dépassées. En cas de revente au cours de ces cinq ans, le produit de la vente doit venir en déduction des coûts éligibles et donner lieu à un remboursement à due concurrence de l'aide y relative.

Art. 9.- Coûts éligibles

Les coûts éligibles sont strictement limités aux dépenses d'investissement supplémentaires pour atteindre les objectifs de protection de l'environnement ou d'utilisation rationnelle de l'énergie. Ils sont calculés abstraction faite des avantages retirés d'une éventuelle augmentation de la production, des économies de coûts et des productions accessoires additionnelles pendant les cinq premières années à compter de l'octroi de l'aide.

Les coûts relatifs à un projet donné ne sont éligibles que pour autant qu'ils dépassent l'investissement de l'entreprise nécessaire pour permettre à celle-ci de se mettre en conformité avec les normes communautaires en la matière. En cas d'adaptation à des normes nationales plus sévères que les normes communautaires ou en cas de dépassement volontaire des normes communautaires, les coûts éligibles comportent les dépenses d'investissement supplémentaires pour atteindre le niveau de protection de l'environnement ou d'utilisation rationnelle de l'énergie supérieur aux normes communautaires.

En l'absence de normes communautaires, les coûts admissibles comportent les dépenses d'investissement nécessaires pour atteindre un niveau de protection de l'environnement ou d'utilisation rationnelle de l'énergie supérieur au niveau qui serait atteint en l'absence de toute aide.

Dans le cas des investissements de production d'énergie électrique à partir de sources renouvelables, les coûts éligibles correspondent aux surcoûts supportés par l'entreprise en comparaison avec une installation de production d'énergie traditionnelle de même capacité en termes de production effective d'énergie ou avec une fourniture de tiers d'un même volume d'énergie.

Art. 10.- Régime d'aide transitoire pour les PME

Pendant une période de trois ans à compter de l'adoption de nouvelles normes communautaires obligatoires, des aides à l'investissement en faveur de PME d'un niveau maximal de 15% brut des coûts éligibles peuvent être accordées.

Les coûts éligibles comportent les dépenses d'investissement supplémentaires pour atteindre le niveau de protection de l'environnement requis par les nouvelles normes communautaires.

Art. 11.- Instrument

Une commission consultative demandée en son avis, les ministres compétents peuvent accorder l'aide destinée à encourager les investissements définis sous les articles 3, 4, 5, 6 et 10 sous forme d'une subvention en capital. La composition et le fonctionnement de la commission consultative sont déterminés par règlement grand-ducal.

Art. 12.- Introduction de la demande

Les demandes d'aides devront être introduites sous peine de forclusion avant le début d'exécution des opérations visées à l'article 1er.

Art. 13.- Procédure de décision

La commission mentionnée à l'article 11 a pour mission de donner, sur base des critères établis par la présente loi et les règlements grand-ducaux pris en son exécution, un avis sur les demandes présentées. Elle pourra s'entourer de tous renseignements utiles, entendre les requérants en leurs explications et se faire assister par des experts.

Art. 14.- Restitution

Le bénéficiaire des aides prévues aux articles 3, 4, 5, 6 et 10 de la présente loi perd l'avantage lui consenti si, avant l'expiration d'un délai de cinq ans à partir du versement de la subvention en capital, il aliène les investissements en vue desquels l'aide de l'Etat a été accordée ou s'il ne les utilise pas ou cesse de les utiliser aux fins et conditions prévues.

Dans ces cas, le bénéficiaire doit rembourser la subvention en capital afférente aux actifs aliénés.

Art. 15.- Ministres compétents

Au sens de la présente loi, les termes «ministres compétents» désignent les ministres ayant dans leurs attributions l'Economie et les Finances, procédant par décision commune.

Art. 16.- Dispositions pénales

Les personnes qui ont obtenu un des avantages prévus par la présente loi sur la base de renseignements sciemment inexacts ou incomplets, sont passibles des peines prévues à l'article 496 du code pénal, ceci sans préjudice de l'obligation pour l'entreprise bénéficiaires de restituer ces avantages.

Art. 17.- Dispositions abrogatoires et transitoires

L'article 7 de la loi modifiée du 27 juillet 1993 ayant pour objet

1. le développement et la diversification économiques;
2. l'amélioration de la structure générale et de l'équilibre régional de l'économie est abrogé.

Toutefois les engagements contractés par l'Etat et les entreprises sur la base desdites dispositions gardent leur pleine valeur et continuent d'être exécutées sur la base et en fonction des dispositions de cette loi.

Les opérations visées à l'article 1er mises en oeuvre avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont susceptibles de faire l'objet d'une intervention au titre des dispositions de la présente loi pour autant que la demande vérifie la condition énumérée à l'article 12.

Art. 18.- Dispositions diverses

Les aides prévues aux articles 3, 4, 5, 6 et 10 sont accordées dans les limites des crédits budgétaires.

Des règlements grand-ducaux pourront introduire des conditions supplémentaires pour l'octroi des aides prévues par les articles 3, 4, 5, 6 et 10 et subordonner lesdites aides à des investissements ou dépenses minima.

Les dispositions de la présente loi sont applicables jusqu'au 31 décembre 2007.

Mandons et ordonnons que la présente loi soit insérée au Mémorial pour être exécutée et observée par tous ceux que la chose concerne.

Le Ministre de l'Economie,

Henri Grethen

Le Ministre des Finances,

Jean-Claude Juncker

Villars-sur-Ollon, le 22 février 2004.

Henri

Doc. parl. 5099 sess. ord. 2002-2003 et 2003-2004