Loi du 25 août 1983 relative à la protection juridique du consommateur.
Nous JEAN, par la grâce de Dieu, Grand-Duc de Luxembourg, Duc de Nassau;
Notre Conseil d'Etat entendu;
De l'assentiment de la Chambre des Députés;
Vu la décision de la Chambre des Députés du 15 juillet 1983 et celle du Conseil d'Etat du 15 juillet 1983 portant qu'il n'y a pas lieu à second vote;
Avons ordonné et ordonnons:
Art. 1er.
Dans les contrats conclus entre un fournisseur professionnel de biens de consommation, durables ou non, ou de services et un consommateur final privé, toute clause ou toute combinaison de clauses qui entraîne dans le contrat un déséquilibre des droits et obligations au préjudice du consommateur est abusive et comme telle réputée nulle et non écrite.
Art. 2.
Sont notamment à considérer comme abusives:
1° | Les clauses excluant ou limitant la garantie légale en cas de vice caché. |
2° | Toute clause conventionnelle portant augmentation de la créance en raison de sa réclamation en justice. |
3° | Les clauses interdisant au consommateur de suspendre en tout ou en partie le versement des sommes dues si le fournisseur ne remplit pas ses obligations. |
4° | Les clauses, selon lesquelles le fournisseur se réserve le droit de modifier ou de rompre unilatéralement le contrat sans motif spécifique et valable stipulé dans le contrat. |
5° | Les clauses excluant le droit pour le consommateur de demander la résiliation du contrat, lorsque la fourniture ou la prestation n'est pas effectuée dans le délai promis ou, à défaut d'indication de délai, dans un délai raisonnable ou d'usage. |
6° | Les clauses, par lesquelles le fournisseur se réserve, sans motif valable et spécifié dans le contrat, le droit de fixer unilatéralement la date d'exécution de son obligation. |
7° | Les clauses prévoyant que les biens ne doivent pas correspondre à leurs éléments descriptifs essentiels pour le consommateur ou à l'échantillon ou à l'usage spécifié par le consommateur et accepté par le fournisseur ou, à défaut de cette spécification, à leur usage normal. |
8° | Les clauses réservant au fournisseur le droit de déterminer unilatéralement si le bien ou la prestation est conforme ou non au contrat. |
9° | Les clauses, selon lesquelles le contrat est prorogé pour une durée supérieure à un an si le consommateur ne le dénonce pas à une date déterminée. |
10° | Les clauses prévoyant la détermination du prix au moment de la fourniture ou des fournitures successives ou permettant au stipulant de l'augmenter, même en considération de critères objectifs, si le consommateur n'a pas corrélativement le droit de résilier le contrat lorsque le prix définitif devient excessif pour le consommateur par rapport à celui auquel il pouvait s'attendre lors de la conclusion du contrat. |
11° | Les clauses imposant au consommateur un délai anormalement court pour faire des réclamations au fournisseur. |
12° | Les clauses excluant le droit pour le consommateur de résilier le contrat lorsque le fournisseur a l'obligation de réparer le bien et n'a pas satisfait à cette obligation dans un délai raisonnable. |
13° | Les clauses excluant pour le consommateur le droit de recourir aux tribunaux de droit commun. |
14° | Les clauses permettant au fournisseur de substituer à la fourniture ou à la prestation promise une fourniture ou une prestation différente, à moins que celle-ci n'ait été spécifiée au contrat et expressément acceptée par le consommateur. |
15° | Les clauses imposant au consommateur la charge de la preuve incombant normalement au fournisseur. |
16° | Les clauses interdisant au consommateur d'invoquer la compensation à l'égard du fournisseur. |
17° | Les clauses contenues dans des contrats portant sur la fourniture de gaz, d'électricité ou de combustibles et obligeant à un minimum de consommation. |
18° | Les clauses, par lesquelles celui qui s'engage à effectuer un travail déterminé sur une chose qui lui est remise à cette fin, exclut ou limite son obligation de veiller à la conservation de cette chose et de la restituer après le travail effectué. |
19° | Les clauses, par lesquelles le consommateur renonce à l'égard du réparateur d'une chose ou à l'égard de celui qui effectue sur elle des travaux, d'invoquer la garantie incombant à un vendeur professionnel en raison des travaux et pièces nouvelles fournis par celui-ci. |
20° | Les clauses, par lesquelles un consommateur final privé consent à une cession de créance au profit d'un tiers en renonçant à faire valoir contre celui-ci les droits et exceptions qu'il pouvait faire valoir contre son cocontractant. |
Art. 3.
Nonobstant toute clause contraire, les dispositions protectrices du consommateur inscrites dans la présente loi s'appliquent aux contrats de vente ou de prestations de services conclus par des professionnels, établis ou non au Luxembourg, avec des consommateurs finals privés domiciliés au Luxembourg, lorsque la marchandise doit être livrée ou la prestation de services exécutée au Luxembourg.
Art. 4.
Nonobstant toute clause contraire, les litiges entre parties domiciliées au Luxembourg et relatifs aux contrats de vente ou de prestations de services conclus avec un consommateur final privé sont portés devant la juridiction du domicile du consommateur, lorsque la marchandise doit être livrée ou la prestation de services exécutée au Luxembourg.
Il en est de même au cas où le cocontractant du consommateur est domicilié à l'étranger, pourvu que la conclusion du contrat ait été précédée au Luxembourg d'une proposition spécialement faite ou d'une publicité et que le consommateur y ait accompli les actes nécessaires à la conclusion du contrat.
La disposition prévue à l'alinéa qui précède ne s'applique pas au contrat de transport lorsque le cocontractant est établi dans un Etat-membre des Communautés Européennes.
Le consommateur peut porter le litige devant la juridiction du domicile de son cocontractant.
Lorsque la juridiction compétente est le tribunal d'arrondissement, l'affaire est instruite et jugée d'après la procédure ordinaire prévue en matière commerciale.
Art. 5.
Le président du tribunal d'arrondissement du domicile du demandeur peut, à la requête de toute personne, d'un groupement professionnel ou d'une association de consommateurs représentée à la commission des prix, constater le caractère abusif d'une clause ou d'une combinaison de clauses au sens des articles 1er et 2 et dire que cette clause ou combinaison de clauses est réputée nulle et non écrite.
L'action est introduite et jugée comme en matière de référé.
L'affichage de la décision pourra être ordonné à l'intérieur des installations de vente de l'utilisateur de la clause et aux frais de celui-ci. La décision précisera la durée de l'affichage. Elle pourra également ordonner la publication, en totalité ou par extrait, aux frais de l'utilisateur de la clause, par la voie des journaux ou de toute autre manière.
Il ne pourra être procédé à l'affichage et à la publication qu'en vertu d'une décision judiciaire non susceptible d'appel ou d'opposition.
Art. 6.
Le fournisseur professionnel qui invoque à l'encontre d'un consommateur final privé une clause ou une combinaison de clauses, déclarée abusive et comme telle nulle et non écrite, par une décision judiciaire irrévocable intervenue à son égard, est puni d'une amende de 3.000 à 100.000 francs.
Les personnes, les groupements professionnels et les associations représentatives de consommateurs visés à l'article précédent sont recevables à se constituer partie civile devant les juridictions répressives relativement aux faits portant un préjudice à leurs intérêts particuliers ou collectifs.
Art. 7.
Dans les contrats conclus par correspondance entre un fournisseur professionnel et un consommateur final privé, celui-ci a la faculté, dans les sept jours de la commande ou de l'engagement d'achat, et dans les quinze jours de la réception de la marchandise, d'y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception. Toute clause du contrat par laquelle le client abandonne son droit de renonciation est nulle et réputée non écrite.
En cas de contestation relative à la date de la commande ou de l'engagement d'achat ou de la réception de la marchandise, la charge de la preuve incombe au fournisseur professionnel.
Art. 8.
Il est inséré dans la loi du 5 mars 1970 sur le colportage et les professions ambulantes, un chapitre V- 1 intitulé: «Du sort des contrats» et comportant les articles suivants:
Art. 14-1. Les contrats conclus en violation des dispositions de la présente loi sont nuls. Cette nullité ne peut toutefois être invoquée que par le consommateur final privé. Art. 14-2. Dans les contrats conclus par démarchage à domicile avec un consommateur final privé, celui-ci a la faculté, dans les sept jours de la commande ou de l'engagement d'achat, et dans les quinze jours de la réception de la marchandise, d'y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception. Toute clause du contrat par laquelle le client abandonne son droit de renonciation est nulle et réputée non écrite. En cas de contestation relative à la date de la commande, ou de l'engagement d'achat ou de la réception de la marchandise, la charge de la preuve incombe au vendeur.
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Art. 9.
Le réparateur d'une chose ou celui qui effectue sur elle des travaux doit dans la facture indiquer la nature des travaux effectués, en précisant, le cas échéant, les éléments remplacés ou ajoutés, ainsi que la durée des travaux. A l'égard de ces travaux et des pièces nouvelles il assume la même garantie qu'un vendeur professionnel.
A défaut de ces indications dans la facture, celui qui a effectué des travaux sur la chose doit lorsque celle-ci n'est pas en état de rendre les services auxquels elle est destinée, rapporter la preuve que ce fait n'est pas dû à son intervention.
Art. 10.
Celui qui répare une chose qui lui a été confiée à ces fins ou qui y apporte des améliorations ne peut retenir cette chose en garantie du paiement de ces réparations ou améliorations lorsqu'il y a disproportion caractérisée entre la valeur de la chose et le montant dû.
Art. 11.
Toute description des caractéristiques et qualités d'un produit ou service faite dans des documents et moyens de publicité, de même que toute garantie y offerte sont réputées faire partie intégrante du contrat relatif à ce produit ou ce service, même si la publicité est le fait du fabricant, du détenteur ou de l'exploitant de la marque ou de tout autre professionel situé en amont du vendeur ou du prestataire de service en cause.
Lorsque le produit ou le service n'est pas conforme à cette description, le consommateur peut demander la résolution du contrat ou une diminution du prix.
Art. 12.
L'article 15 de la loi du 23 décembre 1909 portant création d'un registre aux firmes est complété par un alinéa ayant la teneur suivante:
«Lorsque le magasin est exploité par une personne morale, l'inscription devra indiquer sa forme juridique et la désignation sous laquelle elle exerce le commerce».
Mandons et ordonnons que la présente loi soit insérée au Mémorial pour être exécutée et observée par tous ceux que la chose concerne.
Le Ministre de la Justice, Colette Flesch |
Château de Berg, le 25 août 1983. Jean |
Doc. parl. n° 2217, sess. ord. 1977-1978; 1979-1980; 1980-1981 et 1982-1983. |