Loi du 25 février 1950 concernant l'indemnisation des dommages de Guerre.



Nous CHARLOTTE, par la grâce de Dieu, Grande-Duchesse de Luxembourg, Duchesse de Nassau, etc., etc., etc. Notre Conseil d'Etat entendu;

De l'assentiment de la Chambre des Députés;

Vu la décision de la Chambre des Députés du 19 janvier 1950 et celle du Conseil d'Etat du 3 février 1950 portant qu'il n'y a pas lieu à second vote;

Avons ordonné et ordonnons:

Titre I.


Dispositions générales.

Art. 1 er.

Seront indemnisés, sous les conditions et modalités ci-après:

a) les Luxembourgeois qui depuis le 10 mai 1940 ont subi un dommage de guerre à leurs biens, tant mobiliers qu'immobiliers situés dans le Grand-Duché, ainsi que ceux qui, s'y trouvant domiciliés à cette date ou à celle du sinistre, ont éprouvé un dommage à leur personne;

b) les personnes, qui le 10 mai 1940 étaient de nationalité luxembourgeoise et ont accepté dans la suite la nationalité d'un pays allié, aux fins de s'enrôler dans les armées de ce pays et d'y combattre l'ennemi, si elles remplissent les autres conditions de dédommagement prévues sub a).

Art. 2.

Pourront être indemnisés en tout ou en partie de l'accord du Ministre compétent:

a) les Luxembourgeois domiciliés à l'étranger devenus victimes politiques au sens des dispositions du Titre II, exclusivement pour leur dommage politique et corporel;

b) les apatrides et les étrangers domiciliés depuis 1930 au Grand-Duché et qui ont rendu des services signalés au pays.

Art. 3.

Les personnes morales de nationalité luxembourgeoise d'après la législation actuellement en vigueur sont admises au bénéfice de l'indemnisation pour dommages de guerre.

Toutefois l'indemnisation n'a lieu pour les sociétés qu'au prorata de la participation luxembourgeoise dans le capital social. Il leur incombe d'établir la participation luxembourgeoise dans leur capital social à la date du sinistre. Le paiement des sommes revenant aux sociétés à titre de dommages de guerre ne se fera qu'à mesure des réinvestissements dans les entreprises des sociétés.

Les restrictions prévues à l'alinéa qui précède ne s'appliquent ni aux associations sans but lucratif, ni aux établissements d'utilité publique, constitués en vertu de la loi du 21 avril 1928 ou d'une loi spéciale, ni aux congrégations et associations religieuses, reconnues ou non par l'Etat, qui, établies au Grand-Duché, y exercent leur activité.

Art. 4.

L'indemnisation ne tient pas compte des aménagements ou éléments purement somptuaires que pouvait comporter le bien détruit.

Une indemnisation pour le dommage moral subi n'est pas accordée.

Un dédommagement pour des gains non réalisés n'est alloué que dans les limites de la présente loi.

Art. 5.

Les dommages de guerre seront indemnisés dans les limites des crédits budgétaires.

Le paiement se fera au fur et à mesure des liquidités mises à la disposition du Ministère des Dommages de guerre. Ces liquidités seront utilisées suivant les principes édictés par un règlement d'administration publique à prendre sur avis obligatoire du Conseil d'Etat. Ce règlement établira pour l'octroi des indemnités un système de priorités tenant compte à la fois

'a) de la priorité à accorder à la réparation des dommages subis par les victimes de la répression nazie, b) de l'intérêt économique du pays, c) de la situation et des besoins des sinistrés.

Les sommes avancées, de l'accord des Ministres de la Reconstruction et des Dommages de Guerre, par le sinistré lui-même pour la reconstruction ou la réparation de ses immeubles seront remboursées par le Ministère des Dommages de Guerre aux conditions et d'après les modalités à fixer par arrêté ministériel.

Ces avances porteront intérêts, dont le taux sera déterminé par arrêté ministériel, à partir du premier janvier de la troisième année suivant leur déboursement.

Art. 6.

Le Ministre des Dommages de Guerre décidera dans quels cas il y aura lieu à réparation en nature du dommage causé ou à un dédommagement en espèces. Dans cette dernière hypothèse, l'indemnité devra par préférence être employée à la réparation du dommage et aucun créancier ne pourra s'y opposer. Le Ministre des Dommages de Guerre aura le droit d'exiger le remploi de l'indemnité et de prendre toutes les mesures nécessaires pour en assurer l'exécution.

Art. 7.

L'indemnisation pourra se faire également en rente viagère ou en obligations à émettre par l'Etat.

Les conditions d'émission, d'attribution, de négociabilité et de remboursement de ces obligations seront déterminées par un règlement d'administration publique.

Art. 8.

Seront défalquées:

a) Les sommes déjà versées à titre de dédommagement des sinistrés de la guerre et des victimes politiques notamment par l'Etat, les communes, l'Office de récupération économique, les oeuvres sociales ou par des tiers reconnus responsables;

b) les sommes, primes correspondantes déduites, qui auraient été payées aux intéressés en exécution d'un contrat d'assurance contre les suites préjudiciables des actes de guerre.

c) les sommes allouées par des pays étrangers au titre des dommages de guerre pour des causes donnant lieu à indemnisation en vertu de la présente loi.

Les assurances-vie ne sont pas défalquées.

Art. 9.

Ne tombent pas sous l'application de la présente loi les dommages de guerre qui ont été indemnisés conformément à la législation en vigueur sous l'occupation allemande, ou suivant les dispositions de l'Aide Mutuelle Interalliée.

Art. 10.

L'Etat luxembourgeois est subrogé aux droits pouvant compéter aux sinistrés en vertu des présentes dispositions contre des puissances belligérantes.

Jusqu'à concurrence des indemnités payées, il est subrogé à leurs droits de recours contre des tiers.

Art. 11.

Si le dommage a été causé en tout ou en partie par la faute du sinistré ou des personnes dont il est civilement responsable, s'il a fautivement négligé de l'éviter ou de l'amoindrir, le dédommagement sera réduit en proportion de sa responsabilité.

Art. 12.

Sont exclues du bénéfice de la présente loi les personnes qui, du chef d'une des infractions prévues par les articles 113 à 123 octiès du code pénal ou du chef du délit prévu par l'art. 4 de l'arrêté grand-ducal du 22 avril 1941, relatif aux mesures de dépossession effectuées par l'ennemi, auront été condamnées par une décision coulée en force de chose jugée.

L'indemnisation pourra être refusée en tout ou en partie

1° aux personnes physiques ou morales dont le comportement ou l'activité durant l'occupation a donné lieu à une réprobation telle qu'un acte de solidarité et de secours de la communauté ne se justifierait pas à leur égard;

2° à celui qui, du chef de l'une des infractions prévues à l'art. 16 ci-après, aura été condamné par une décision coulée en force de chose jugée.

Contre la décision de refus total ou partiel un recours est ouvert aux personnes visées à l'alinéa qui précède dans les formes et délais des articles 22 et suivants ci-après.

Art. 13.

Aussi longtemps que demeure susceptible de recours une décision judiciaire dont l'effet serait d'exclure le sinistré du bénéfice de la présente loi, l'exercice du droit à la réparation reste suspendu, jusqu'à ce qu'une décision définitive mette fin à l'instance.

De même, en cas d'instruction ouverte à charge d'une personne, sur pied des dispositions indiquées aux articles 12 et 16, l'exercice du droit à la réparation reste suspendu.

Art. 14.

Le droit à l'indemnisation pour le dommage subi est censé prendre naissance, soit dans la personne du propriétaire de la chose sinistrée au moment du sinistre, soit dans la personne de la victime du dommage politique ou corporel, tel que ce dommage est défini dans les titres II et III de la présente loi.

Il est transmissible aux héritiers légaux, à condition que ceux-ci remplissent dans leur propre chef, au moment de la transmission, les conditions requises pour bénéficier de la présente loi. La part successorale dévolue à un héritier, qui serait exclu personnellement du bénéfice de la loi sur les dommages de guerre, n'accroît pas aux autres héritiers.

Pour les biens appartenant aux communautés entre époux, dont le mari est étranger, apatride ou incivique, l'indemnité sera de 50%, si la femme remplit dans son propre chef les conditions requises pour bénéficier de la présente loi. Toutefois, sauf le cas de remploi immobilier, cette part pourra être rendue indisponible par décision du Ministre des Dommages de guerre jusqu'à la dissolution de la communauté.

En cas de dispositions à cause de mort, le consentement du Ministre des Dommages de Guerre devra être demandé dans les six mois du décès du sinistré. Les légataires doivent remplir dans leur propre chef les conditions requises pour bénéficier de la présente loi. L'accroissement des legs n'opère pas en cas d'exclusion d'un légataire.

Sous peine de nullité, il ne peut être procédé dans un partage à l'attribution du droit d'indemnisation hors la présence du Ministre des Dommages de guerre ou de son délégué.

Le droit à indemnisation ne peut, sauf autorisation du Ministre des Dommages de guerre, être ni aliéné entre vifs à quelque titre ou sous quelque forme que ce soit, même à titre gratuit, ni cédé, ni saisi, ni être l'objet d'une constitution de gage.

A titre exceptionnel et dans des cas particulièrement favorables, le Ministre des Dommages de guerre peut encore, dans les deux ans de l'entrée en vigueur de la loi, agréer les actes juridiques de transfert non autorisés, antérieurement intervenus.

L'article 1166 du Code civil n'est pas applicable en matière de dommages de guerre.

Art. 15.

Tout sinistré doit sous peine de déchéance faire une déclaration de dommages de guerre au Bourgmestre du lieu du sinistre. Si le dommage a été subi à l'étranger dans les conditions spécifiées ci-après au titre II ou si le lieu du sinistre est inconnu, elle sera faite au bourgmestre du dernier domicile dans le Grand-Duché avant le sinistre. Un règlement d'administration publique fixera les modalités de ces déclarations.

La déclaration devra être faite dans les trois mois de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Si l'ayant droit justifie avoir été dans l'impossibilité de faire la déclaration dans le délai fixé ci-avant, il pourra être relevé de la déchéance encourue par le Ministre ayant dans ses attributions les Dommages de Guerre.

Les déclarations faites antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi peuvent être complétées ou rectifiées jusqu'à l'expiration du délai fixé ci-avant sinon, elles seront censéesavoir été faites pour l'application du présent article dans le dit délai.

Les déclarations frauduleuses ne peuvent plus être rectifiées si l'intéressé a accepté sans réserves un acompte.

Art. 16.

Sera puni d'un emprisonnement de 8 jours à 3 ans et d'une amende de 501 à 1.000.000 francs ou d'une de ces peines seulement :

1° quiconque aura sciemment fourni des déclarations fausses sur un fait décisif quant au fondement ou quant au montant de ses prétentions au dédommagement;

2° quiconque, dans le but de faire agréer une demande injustifiée ou exagérée, aura influencé ou tenté d'influencer des témoins, experts ou toutes autres personnes.

Les dispositoins du Livre premier du Code pénal ainsi que celles de la loi du 18 juin 1879, modifiée par la loi du 16 mai 1904, portant attribution aux cours et tribunaux de l'appréciation des circonstances atténuantes, seront applicables.

Les juges pourront ordonner la publication de leur décision dans un ou plusieurs quotidiens aux frais de la personne condamnée.

Par dérogation à l'article 638 du Code d'instruction criminelle l'action publique et l'action civile résultant des infractions ci-dessus se prescriront après 10 années révolues à compter du jour où l'infraction aura été commise, si dans cet intervalle il n'a été fait aucun acte d'instruction ni de poursuite.

Les infractions à cette loi et aux règlements d'administration publique en matière de dommages de guerre seront constatées par les agents de la police générale ou locale ou par les organes assermentés des Ministères des Dommages de guerre ou de la Reconstruction.

Les agents appelés à constater les infractions ci-dessus visées qui ne sont pas assermentés, prêteront, avant d'entrer en fonctions, devant le tribunal d'arrondissement de leur résidence le serment suivant :

«Je jure fidélité au Grand-Duc, obéissance à la Constitution et aux lois de l'Etat. Je promets de remplir fidèlement mes fonctions avec intégrité, exactitude et impartialité. Ainsi Dieu me soit en aide.»

L'acte de prestation du serment sera transcrit et visé au greffe des deux tribunaux d'arrondissement.

Toutefois, en cas d'infraction à la présente loi, le Ministre des Dommages de guerre a la faculté de transiger avec le sinistré sur le montant de l'indemnisation. Ces transactions constatées par écrit éteignent l'action publique. Les transactions intervenues antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi sont validées.

Art. 17.

Le Ministre des Dommages de guerre procédera à toutes les mesures d'instruction qu'il jugera nécessaires.

Il peut avoir recours à ces fins aux autorités judiciaires et administratives.

Il est autorisé à entendre les témoins et les experts sous la foi du serment.

Les compagnies d'assurance et les instituts de crédit devront lui fournir toutes les données qui leur sont demandées pour les besoins de l'instruction visée à l'alinéa premier.

Art. 18.

Le Ministre des Dommages de guerre fait connaître à l'intéressé par avis motivé adressé sous pli recommandé à la poste, sa décision provisoire portant admission ou refus de la demande et fixant, s'il y a lieu, le montant de l'indemnité à accorder.

Le sinistré est invité, en même temps, à formuler ses objections dans un délai de 30 jours. Passé ce délai, il est réputé avoir accepté la décision. Pendant la durée de ce délai, le dossier est tenu à sa disposition au siège de l'Office des Dommages de guerre.

Le sinistré qui n'a pas accepté la décision provisoire est invité au moins huit jours d'avance à comparaître à heure fixe, devant le Ministre des Dommages de guerre ou son délégué.

La comparution doit être personnelle, sauf les cas d'impossibilité à apprécier souverainement par le Ministre des Dommages de guerre.

Le sinistré peut être assisté d'un conseil. Il est donné acte, en tous cas, au sinistré de sa comparution.

Art. 19.

Si, lors de cette comparution, l'accord se fait entre le sinistré et le Ministre des Dommages de guerre, il en est immédiatement dressé acte qui est signé par les deux parties en cause.

Art. 20.

Si un accord ne peut intervenir, il est, éventuellement après une dernière invitation à comparaître, dressé acte de la position dernière prise par les parties au cours de la discussion.

Le sinistré a le droit de faire insérer dans l'acte de comparution ses observations.

Si le sinistré s'abstient de comparaître ou de transmettre l'énoncé de ses observations, il en est dressé acte qui fait foi de son contenu jusqu'à preuve du contraire.

Art. 21.

Dans les trois mois de l'acte dressé conformément à l'article qui précède, le Ministre des Dommages de guere statue sur la demande par avis motivé qu'il notifie par pli recommandé à l'auteur de la demande.

Art. 22.

Il est ouvert aux bénéficiaires de la présente loi, qui n'ont pas accepté la décision du Ministre des Dommages de guerre visée à l'art. 21, une action en fixation de la créance d'indemnité contre l'Etat, représenté par le dit Ministre, devant les tribunaux d'arrondissement qui connaissent en dernier ressort.

Ces juridictions seront également compétentes pour statuer sur toutes les autres difficultés que soulève le litige. Toutefois, si le différend porte sur une question, qui ne constitue pas un litige entre le réclamant et l'Etat au titre des dommages de guerre, mais soulève une contestation entre le réclamant et un tiers, cette difficulté est à vider d'après les dispositions du droit commun.

Art. 23.

L'action est à intenter, sous peine de déchéance, dans les trois mois à partir de la réception de la décision du Ministre des Dommages de guerre prévue à l'art. 21.

Si le Ministre des Dommages de guerre a omis de statuer dans le délai de trois mois lui imparti par l'art. 21, l'intéressé pourra se pourvoir à partir de l'expiration du dit délai.

La procédure applicable devant les tribunaux d'arrondissement, statuant en matière de dommages de guerre, est celle qui se fait devant les tribunaux de commerce.

Tous moyens de preuve, même par simples présomptions, sont admis pour établir la réalité et l'importance des dommages de guerre ainsi que la relation de cause à effet entre l'événement donnant lieu à indemnisation aux termes de la présente loi et le dommage.

Art. 24.

Un recours en cassation est ouvert aux parties contre les décisions des tribunaux d'arrondissement, statuant en matière de dommages de guerre, dans les cas et les délais et suivant les formes prévus pour les pourvois en cassation en matière civile.

En cas de cassation donnant lieu à un nouvel examen du fond, la cause sera obligatoirement renvoyée pour être instruite et jugée de nouveau devant une autre juridiction de même nature que celle dont le jugement aura été cassé.

Art. 25.

Les minutes, expéditions, extraits et copies des décisions et en général tous les actes de procédure auxquels donnera lieu l'application de la présente loi, sont dispensés des formalités du timbre et de l'enregistrement. Ils porteront la mention expresse qu'ils sont faits en exécution de la présente loi.

Art. 26.

Peuvent être annulés par le tribunal d'arrondissement les décisions définitives d'indemnisation rendues par le Ministre des Dommages de guerre ainsi que les jugements rendus sur l'action visée à l'art. 22, alinéa 1er, lorsque ces décisions ou jugements ont été pris erronément, soit que le sinistré aurait dû être exclu en vertu de l'alinéa premier de l'art. 12 de la présente loi, soit qu'il y eût fraude de sa part.

La demande sera introduite par le Ministre des Dommages de guerre ou d'office par le Procureur d'Etat.

En cas d'erreur matérielle la décision peut être rectifiée par les mêmes juridictions à la requête, soit du Ministre des Dommages de guerre soit de l'intéressé.

Les règles de procédure établies par la présente loi s'appliquent à ces demandes en annulation et en rectification.

Les dispositions du présent article sont également applicables aux indemnités déjà payées et aux travaux de reconstruction achevés.

Les décisions d'annulation ou de rectification ordonneront, s'il y a lieu, le remboursement des sommes indûment liquidées ou versées au sinistré.

Art. 27.

Art. 28.

Toutes les actions ouvertes sur la base des dispositions qui précédent sont portées au choix du demandeur soit devant le tribunal d'arrondissement de Luxembourg, soit devant celui de Diekirch.

Art. 29.

Le Ministre des Dommages de guerre est autorisé à accorder des avances aux sinistrés suivant les modalités à fixer par un règlement d'administration publique qui s'inspirera des principes inscrits à l'art. 5.

Art. 30.

Il peut exceptionnellement, après délibération du Gouvernement en Conseil, accorder des indemnités pour éviter des cas de rigueur.

Art. 31.

Les employés des Offices des Dommages de guerre et de la Reconstruction ont le caractère d'employés privés dont la rémunération est fixée par décision du Gouvernement en Conseil.

Art. 32.

Les fonctionnaires et employés de l'Etat ou des Etablissements publics qui ont été détachés aux deux Offices prémentionnés formeront un cadre spécial qui comprend :

a) pour l'Office des Dommages de guerre :

1 inspecteur de direction qui est rangé au groupe XIb du tableau A annexé à la loi du 21 mai 1948,

1 chef de bureau qui est rangé au groupe IX b,

2 sous-chefs de bureau qui sont rangés au groupe VIb, des commis qui sont rangés au groupe Vb et des expéditionnaires suivant les besoins du service ;

b) pour l'Office de la Reconstruction :

1 inspecteur de direction qui est rangé au groupe XIb, 2 sous-chefs de bureau qui sont rangés au groupe VIb,

des commis qui sont rangés au groupe Vb et des expéditionnaires suivant les besoins du service.

Les conditions de nomination et d'avancement sont celles qui sont applicables au personnel des bureaux du Gouvernement.

Les années de service déjà passées dans les emplois visés ci-avant sub a) et b) seront prises en considération pour les triennales à allouer aux fonctionnaires nommés en exécution de la présente loi.

Les fonctionnaires détachés actuellement à l'Office des Dommages de guerre pourront être promus aux fonctions énumérées ci-avant, s'ils remplissent les conditions pour avancer en grade dans les administrations ou établissements dont ils relèvent.

Art. 33.

Les personnes physiques et morales de nationalité étrangère, sauf les ressortissants étrangers visés aux articles 1er et 2, ne peuvent être admises à l'indemnisation des dommages de guerre subis sur le territoire du pays que sur la base de traités de réciprocité que le Gouvernement est autorisé à conclure avec les pays étrangers.

Il en est de même des personnes morales de droit luxembourgeois visées à l'art. 3 quant au prorata non indemnisable.

Art. 34.

Les crédits qu'exige l'application de la présente législation seront inscrits chaque année au budget des dépenses.

Titre II.


Indemnisation pour perte de traitement, salaire ou revenu normal des personnes victimes de leur attitude patriotique et lésées par suite d'une sanction prise par l'ennemi.

Art. 35.

Les personnes visées à l'art. 1er et domiciliées au Grand-Duché le 10 mai 1940 ainsi que les Luxembourgeois domiciliés à l'étranger à la même date, dans les limites fixées par l'art. 2 a de la présente loi, qui en raison de leur attitude patriotique ont, par un fait de l'occupant, subi une perte de traitement, salaire ou revenu normal, leur conjoint survivant, leurs descendants ou ascendants, reçoivent sur leur demande une indemnité qui sera constatée et évaluée par le Ministre des Dommages de guerre conformément aux dispositions ci-après.

Art. 36.

Peuvent se prévaloir de la disposition qui précède :

1° Les ayants droit des personnes exécutées ou mises à mort par l'ennemi en raison de leur attitude patriotique ou tombées en combattant l'ennemi.

2° Les personnes qui ont été emprisonnées ou internées dans un camp de concentration en raison de leur attitude patriotique.

3° Les déportés politiques, si leur attitude patriotique a été le motif principal de leur déportation.

4° Les personnes destituées de leurs fonctions, celles auxquelles l'exercice de leur profession a été interdit, par les autorités ennemies, exclusivement en raison de leur attitude patriotique ainsi que celles qui, par un acte de pure résistance et afin de se désolidariser de l'occupant, ont intentionnellement renoncé à leurs fonctions ou à l'exercice de leur profession.

5° Les personnes qui ont été déclassées quant à leur traitement ou salaire exclusivement en raison de leur attitude patriotique.

6° Les personnes auxquelles les autorités ennemies ont soustrait leurs rentes ou pensions exclusivement en raison de leur attitude patriotique.

7° Les personnes qui volontairement ont combattu dans les armées alliées ou dans les armées clandestines alliées.

8° Les personnes qui, pour se soustraire aux mesures de rigueur de l'occupant, auxquelles elles étaient exposées en raison de leur activité patriotique dans une organisation de résistance ou d'actes de résistance individuelle caractérisés, même antérieurement au 10 mai 1940, se sont évadées ou cachées, si elles n'avaient pas d'autre moyen d'éviter un danger imminent pour leur vie ou leur liberté.

Le preuve de l'attitude patriotique incombe à l'impétrant.

Art. 37.

Pourront être exclues en tout ou en partie du bénéfice du présent titre les personnes visées par l'article 36, qui ont démérité par leur comportement, indigne d'une victime patriotique, soit à raison d'actes commis au préjudice de leurs compagnons d'infortune, soit à raison de leur attitude à l'égard de l'ennemi, ou dont l'activité était inspirée par un esprit de lucre.

Art. 38.

Sera remboursée, conformément aux taux de conversion prévus par les arrêtés en vigueur concernant l'échange monétaire, la contre-valeur des amendes, frais judiciaires, honoraires d'avocat, frais de pension et de nourriture à la prison déboursés à l'occasion de procès politiques, ainsi que des amendes payées comme otage ou lors de l'établissement des listes de la «Volkstumskartei».

Art. 39.

Le dommage politique sera indemnisé suivant les dispositions ci-après.

Ce dommage consiste, après conversion, aux taux de 1 RM = 10 francs, s'il échet, dans la différence entre le revenu normal que le sinistré aurait eu s'il avait pu librement vaquer à son occupation ordinaire et les revenus qu'il a effectivement eus. Il sera majoré des frais exceptionnels qui ont été une suite directe de la sanction.

Le calcul de cette différence sera fait :

a) sur la base du traitement, salaire ou revenu normal que le sinistré a gagné pendant la période de l'occupation avant le fait dommageable ;

b) si le sinistré pendant le temps de l'occupation n'avait pas de traitement, salaire ou revenu normal, son revenu moyen des années 1936, 1937, 1938, 1939 majoré de 50% en raison de l'augmentation du coût de la vie pendant la guerre sera mis à la base du calcul ;

c) si le sinistré âgé de plus de 18 ans n'avait pas de traitement, salaire ou revenu normal, ni avant le temps de l'occupation, ni pendant ce temps, le salaire qui servira de base au calcul ne pourra pas être inférieur à 1.500 francs par mois.

Art. 40.

Sera déduit le traitement, salaire ou revenu normal net que le sinistré a effectivement touché pendant le temps de l'événement dommageable.

Art. 41.

Le plafond du traitement, salaire ou revenu normal qu'un sinistré aurait pu toucher, s'il avait pu librement vaquer à son occupation ordinaire, est fixé à 10.000 francs par mois, chiffre qui sera augmenté de 500 francs par mois pour l'épouse et de 400 francs par mois pour chaque enfant à charge du sinistré.

Art. 42.

L'indemnité est due jusqu'au jour ou l'événement dommageable a pris fin et au plus tard jusqu'au début du 3me mois qui suit le rapatriement.

En cas d'exécution, de mise à mort ou de décès dans les conditions de l'article 36 1°, les ayants cause de la victime toucheront l'indemnité dans tous les cas jusqu'au 30 septembre 1944.

Art. 43.

Les Luxembourgeois qui sous l'empire de la loi de l'occupant ont été soumis au service militaire forcé, soit qu'ils y aient été effectivement astreints, soit qu'ils aient été réfractaires, pour autant qu'ils ne sont pas indemnisables selon les dispositions qui précèdent, ont droit à une indemnité uniforme et forfaitaire de 6.000 francs pour ceux qui étaient mariés le 10 septembre 1944, augmentée de 1.500 francs par enfant à leur charge et de 4.000 francs pour les célibataires.

Cette indemnité de base est majorée de 750 francs par tranches entières de trois mois calculées depuis l'enrôlement forcé jusqu'au rapatriement effectif mais pour une période de 4 ans au maximum.

En cas de décès ou de présomption de décès de ces personnes, l'indemnité passe à leur conjoint, leurs descendants ou ascendants dans la mesure déterminée à l'article précédent.

Les personnes visées à l'article 36 sub 7° jouissent de la faculté d'opter, soit pour l'indemnisation prévue aux articles 39 à 42 inclusivement, soit pour celle prévue au présent article.

Titre III.


Indemnisation des dommages de guerre corporels.

Art. 44.

Les personnes visées à l'art. 1er et domiciliées au Grand-Duché le 10 mai 1940 ou à la date du sinistre qui, par suite directe d'unacte de guerre ont subi un dommage corporel, leur conjoint survivant, leurs decendants ou ascendants ou toute personne justifiant d'un intérêt légitime ont droit sur leur demande, à une indemnité qui sera constatée et évaluée par le Ministre des Dommages de Guerre conformément aux dispositions ci-après. Il en sera de même du Luxembourgeois domicilié à l'étranger, dans la limite de l'article 2 a du Titre I.

Art. 45.

Sont à considérer comme actes de guerre:

1° Les opérations de combat, sans distinction de la nationalité des belligérants, et les explosions d'engins de guerre, même celles qui se sont produites, en territoire luxembourgeois seulement, après la cessation des hostilités, mais au plus tard jusqu'au 10 septembre 1954 ;

2° Les mesures ordonnées par les autorités militaires ou civiles et qui sont en relation directe avec les actes de guerre ;

3° Les actes de l'ennemi ou de ses organisations contre les personnes visées aux articles 1er et 2.

Tombent notamment sous cette catégorie :

a) les personnes qui, en raison de leur atti tude patriotique, ont été exécutées par l´ennemi ou qui sont mortes soit dans des camps de concentration et des prisons, soit des suites de l´incarcération.

b) les personnes emprisonnées ou internées dans un camp de concentration pour des raisons politiques ;

c) les déportés politiques ;

d) les personnes destituées de leurs fonctions ou celles auxquelles l´exercice de leur profession a été interdit par les autorités ennemies pour des raisons politiques ;

4° Le fait de personnes qui, pour se soustraire aux mesures de rigueur de l´occupant, auxquelles elles étaient exposées en raison de leur activité patriotique dans une organisation de résistance ou d´actes de résistance individuelle caractérisés, se sont évadées ou cachées, si elles n´avaient pas d´autre moyen d´éviter un danger imminent pour leur vie ou leur liberté ;

5° les actes exécutés pour la défense ou la libération de la patrie, notamment par :

a) l´enrôlement dans les armées et formations paramilitaires alliées ;

b) la collaboration pour des motifs patriotiques à un service de renseignement et d´action luxembourgeois ou allié ;

c) la collaboration à une organisation de résistance ;

d) la tentative de rejoindre les armées alliées;

e) la désertion de l´armée allemande ou d´une formation paramilitaire allemande par un non-volontaire ;

f) l´insoumission à l´armée allemande, à l´S.H.D., à l´R.A.D. ou K.H.D., ainsi qu´aux formations paramilitaires allemandes ;

6° Les mutilations volontaires pour échapper au service militaire dans l´armée allemande ainsi qu´aux formations énumérées sub 5 f) ;

7° L´enrôlement forcé dans l´armée allemande ainsi qu´aux formations énumérées sub 5 f).

Art. 46.

Seront indemnisés également les ayants droit des personnes décédées après le retour au pays des suites des mauvais traitements et des privations leur infligés par l'ennemi et qui sont en relation directe avec un acte de guerre suivant l'article 45 de la présente loi.

Art. 47.

Lors de la fixation des indemnités il sera tenu compte respectivement des rentes, des pensions et des secours versés pour les mêmes dommages corporels par une institution sociale quelconque.

Toutefois, les victimes ou les ayants droit des victimes assurées auprès de l'Etablissement d'assurance contre la Vieillesse et l'Invalidité, auprès de la Caisse de pension des Employés privés ou auprès d'institutions analogues peuvent cumuler, nonobstant toutes dispositions légales contraires réglant les prestations de ces institutions, l'indemnité qui leur revient en vertu de la présente loi avec la moitié de la rente ou de la pension qui leur est allouée de la part des dites institutions.

Les dépenses occasionnées aux institutions sociales visées à l'alinéa 1er du chef de l'indemnisation de dommages personnels provenant de faits de guerre, subis par des assurés et des membres de leur famille, seront remboursées àces institutions par l'Office des Dommages de Guerre.

Toutefois le recours des institutions sociales visées à l'alinéa 2 ne portera que sur la moitié de la rente ou de la pension servie par elles.

Le droit de recours des institutions sociales visées à l'alinéa 1er cessera à partir de l'échéance normale des obligations telle qu'elle est prévue par les dispositions afférentes de ces institutions.

L'Office des Dommages de Guerre n'est pas tenu de rembourser des prestations fournies à des assurés ou aux ayants droit de ceux-ci qui sont exclus de l'indemnisation par la présente loi.

Pour autant que les dispositions qui précèdent dérogent à l'art. 14 de la loi du 21 juin 1946 portant abrogation ou modification des dispositions en vigueur en matière d'assurances sociales, elles ont un effet rétroactif au jour de l'entrée en vigueur de la dite loi.

Art. 48.

En cas de décès des personnes devenues victimes en raison de leur attitude patriotique, l'indemnisation des ayants droit se fera d'après les règles suivantes, sans préjudice des dispositions légales, réglementaires ou statutaires sur les pensions :

A. – S´il s´agit d´ayants droit d´un fonctionnaire de l´Etat, des communes, des établissements publics ou des employés aux chemins de fer :

1) La veuve touchera une rente équivalente à 80% du traitement intégral – y compris les allocations familiales, l´indemnité de foyer et les triennales – qu´aurait touché le mari d´après la législation luxembourgeoise ; à partir de la limite d´âge telle qu´elle était fixée pour le mari, la veuve touchera 80% de la pension intégrale à laquelle son mari aurait eu droit.

Chaque enfant à sa charge aura droit à 10% du même traitement jusqu´à l´âge de 18 ans accomplis.

En cas de remariage de la veuve la rente de chaque orphelin sera portée à 15% du traitement susvisé, sans pouvoir être inférieure au montant de la pension se dégageant de l´application des dispositions légales, réglementaires ou statutaires sur les pensions.

2) L´orphelin de père et de mère touchera jusqu´à l´âge de 18 ans accomplis une rente équivalente à 30% du traitement susénoncé.

3) Même après l´accomplissement de la dix-huitième année l´allocation de la rente visée sub 1) et 2) sera continuée :

a) en faveur de tout orphelin atteint d´une in firmité qui le met dans l´impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l´existence ;

b) en faveur de tout orphelin s´adonnant à des études scientifiques ou professionnelles, et ce pendant la durée normalement admise pour l´achèvement de celles-ci.

4) Dans les cas où le divorce a été prononcé aux torts exclusifs du mari, la rente de veuve est allouée à l´épouse divorcée à la condition qu´un jugement ait alloué à l´épouse une pension alimentaire et qu´il n´y ait pas eu remariage.

Dans ces cas, la rente ne pourra pas dépasser le montant de la pension alimentaire.

5) Les dispositions concernant la pension de la veuve et des orphelins sont applicables au profit du veuf ainsi que des enfants manquant de ressources et laissés par une femme qui, en raison de l´incapacité de travail de son mari, a pourvu d´une façon essentielle à la subsistance de sa famille.

6) Si la victime, âgée de 16 ans au moins à la date du fait dommageable, laisse des ascendants, ceux-ci touchent à titre de rente, en cas d´insuffisance de ressources, même survenant postérieurement au fait dommageable, au maximum 30% du traitement visé sub A) 1) s´il s´agit de deux personnes, et au maximum de 20%, s´il s´agit d´une personne seulement.

7) Si la victime laisse des petits-enfants à l´entretien desquels elle a pourvu d´une façon prépondérante, ceux-ci en cas d´insuffisance de ressources touchent par personne 20% du traitement de la victime, au maximum 60% jusqu´à l´âge de 18 ans accomplis. Les dispositions de l´al. 3, a et b, seront également applicables.

8) Les rentes réunies des survivants ne peuvent excéder le montant du traitement tel qu´il est établi sub A) 1). S´il y a plus de 2 enfants, la rente de chaque enfant devra être réduite proportionnellement.

9) Les ascendants et les petits-enfants ne peuvent faire valoir leurs droits que lorsque le maximum susdit n´est pas absorbé par la rente de la veuve et des enfants.

10) Il est alloué aux ayants droit de la victime une indemnité funéraire uniforme de 5.000 francs. Au cas où les frais d´enterrement auront été avancés par un tiers, celui-ci aura droit au remboursement des frais exposés jusqu´à concurrence du montant susmentionné.

11) En cas de remariage de la veuve le paiement de la rente sera continué pendant 2 ans au maximum à condition que l´intéressée ait conservé la nationalité luxembourgeoise et qu´elle soit domiciliée au Grand-Duché.

Il sera loisible au Ministre des Dommages de Guerre de convertir cette rente en un capital unique.

B. – Si la victime n´était pas fonctionnaire ou employé de l´Etat, des communes, des établissements publics ou des chemins de fer, les indemnités des ayants droit de la victime décédée seront calculées sur la base du traitement, salaire ou revenu moyen que la victime a réellement touché en 1937, 1938 et 1939.

La même moyenne, établie en considération de la profession ou de la formation professionnelle de la victime, servira de base à l´indemnisation des ayants droit de ceux qui, bien que n´ayant pas exécuté de travail lucratif pendant ces trois années, ont cependant exercé leur profession pendant la guerre ou auraient pu l´exercer après la libération, s´ils n´avaient pas succombé à la suite de faits de guerre.

Les modalités de fixation et de calcul du traitement, salaire ou revenu moyen feront l´objet d´un règlement d´administration publique qui fixera en outre pour chaque année un coefficient adaptant les salaires, traitements et revenus prévus à l´alinéa précédent aux rémunérations de l´époque afférente et tenant compte des conditions d´âge, de profession ou de formation professionnelle de la victime. Les salaires, traitements et revenus à fixer ne peuvent être inférieurs au salaire minimum ou au salaire social minimum.

La limite d´âge pour la substitution de la pension au salaire, traitement et revenu de base est fixée au jour où le mari aurait atteint l´âge de 65 ans. La pension est uniformément fixée à 80% du taux maximum de la pension des fonc tionnaires de l´Etat.

Les dispositions de l'art. 48 sub A, numéros 1 à 11 trouveront une application analogue.

Art. 49.

Tous les dommages corporels non visés par l'article 48 seront indemnisés d'après les dispositions du Code des Assurances Sociales traitant des prestation en cas d'accident du travail et de maladie professionnelle, sauf les dérogations suivantes :

a) Le salaire, traitement ou revenu servant de base aux rentes à allouer est calculé d'après les dispositions de l'article 48 B sans préjudice des dispositions d et f qui suivent.

b) les incapacités de travail inférieures à 10% ne sont pas indemnisées ;

c) le salaire usité local tel qu'il est prévu par l'article 100 du Code des Assurances Sociales sera remplacé par le salaire minimum gradué ;

d) jusqu'à l'âge de 14 ans accomplis il ne sera pas accordé de rente aux victimes, sauf dans les cas de mutilations graves ou de blessures très douloureuses ou essentiellement défigurantes. Le salaire servant de base au calcul des indemnités sera dans ces cas de 25% du salaire minimum jusqu'à 14 ans accomplis et de 40% du salaire minimum de 14 à 16 ans accomplis ;

e) si une infirmité ou une maladie a été aggravée par un fait de guerre, l'aggravation seule donnera lieu à une indemnité ;

f) pour les personnes qui, antérieurement au dommage de guerre subi, étaient déjà frappées d'incapacité de travail, la fraction du salaire ou du traitement minimum correspondant au degré de capacité qui leur restait, servira de base au calcul de l'indemnité, à moins que le salaire ou le traitement réel ne dépasse ce taux ;

g) les fonctionnaires ou employés de l´Etat, des communes, des établissements publics ou des chemins de fer, jouissant d´un droit à une pension de retraite, auront droit à la moitié de la rente correspondant au taux d´incapacité de travail ; cette rente réduite sera cumulée avec le traitement.

Au cas ou les infirmités ont entrainé un déclassement professionnel, la victime aura droit en outre à une indemnité correspondant à la différence entre l'ancien et le nouveau traitement. Elle sera cumulée avec le traitement.

Si les mutilations, blessures ou maladies ont entraîné la mise à la retraite prématurée de la victime, celle-ci aura droit à une rente supplémentaire qui ne pourra dépasser 1.500 francs par mois, ni être inférieure à 300 francs par mois. Cette rente supplémentaire sera cumulée avec la pension.

La veuve et les orphelins d'une victime qui était fonctionnaire ou employé de l'Etat, des communes, des établissements publics ou des chemins de fer auront droit, en dehors de la pension due en vertu de dispositions légales ou statutaires, à une rente supplémentaire de 300 à 1.500 francs par mois, rente fixée en proportion de la part que l'événement de guerre a eue au décès prématuré de la victime. Cette rente supplémentaire sera cumulée avec la pension prémentionnée.

h) si la victime suivait encore des cours d'instruction ou de formation professionnelle, le salaire servant de base au calcul de l'indemnité sera fixé par une décision du Ministre des Dommages de Guerre, sans qu'il puisse être inférieur au salaire minimum gradué mentionné sub c ;

i) si la victime, âgée de 16 ans au moins à la date du fait dommageable, laisse des ascendants, ceux-ci touchent à titre de rente, en cas d'insuffisance de ressources, même survenant postérieurement au fait dommageable, au maximum 30% du traitement de la victime, s'il s'agit de deux personnes, et au maximum 20%, s'il s'agit d'une personne seulement.

j) l est alloué aux ayants droit de la victime une indemnité funéraire uniforme de 5.000 frs. Au cas où les frais funéraires auront été avancés par un tiers, celui-ci aura droit au remboursement des frais exposés jusqu'à concurrence du montant susmentionné ;

k) le taux de la rente de la veuve des enrôlés de force est fixé à 50% de la rémunération annuelle.

Le taux des autres rentes de veuve est fixé à 40% de la rémunération annuelle. Il sera portéà 50% de celle-ci, tant que la capacité de travail de la veuve est diminuée de 50% au moins par suite d'une maladie ou de toute autre infirmité ; il en sera de même à partir du jour où la veuve aura atteint l'âge de 55 ans, ainsi que dans les cas ou l'intéressée aura à sa charge un orphelin au-dessous de 6 ans accomplis.

l) même après l'accomplissement de la 18e année l'allocation de la rente d'orphelin sera continuée en faveur de tout orphelin atteint d'une infirmité qui le met dans l'impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l'existence ;

m) les rentes des personnes soumises à l'assurance-accident, section agricole et forestière, seront calculées sur la base d'un salaire annuel équivalent au salaire établi pour les travailleurs du Commerce et de l'Industrie.

Les dispositions de l'article 164 de la loi du 17 décembre 1925 concernant le Code des Assurances Sociales ne sont pas applicables.

n) en cas d'incapacité de travail totale la rente plénière est fixée à 80% du salaire. La rente partielle est fixée sur la base de la rente totale en fonction du taux d'incapacité.

Le salaire de base sera réduit de 10% si la victime est du sexe féminin.

o) le Ministre des Dommages de Guerre peut accorder aux grands blessés, aux victimes hospitalisées ainsi qu'à leurs ayants droit un secours spécial; de même il peut accorder un secours approprié aux invalides de guerre pendant la durée de leur rééducation professionnelle ;

p) pour l'évaluation des taux d'incapacité de travail il sera dans chaque cas individuel tenu compte des possibilités réelles d'activité économique encore ouvertes à la victime d'après sa formation professionnelle.

Art. 50.

Les droits des survivants sont également ouverts par la déclaration de présomption de décès de la victime qui rétroagira dans les limites de l'article 51.

Art. 51.

La rente est due aux victimes rapatriées, au plus tôt à partir du jour du rapatriement, à toutes les autres victimes ou à leurs ayants droit à partir du fait dommageable, mais au plus tôt à partir du 1er octobre 1944 et sansqu'il puisse y avoir cumul de l'indemnisation pour dommage politique avec la rente pour dommage corporel.

Art. 52.

Il n'y aura pas lieu à dédommagement, si le fait dommageable a été provoqué intentionnellement par la victime, excepté les mutilations volontaires à l'effet d'échapper au service dans l'armée ou dans une formation paramilitaire allemande.

Art. 53.

En cas de faute grave de la victime la prestation prévue par la présente loi pourra être refusée en tout ou en partie ; toutefois en cas de décès de la victime, la réduction ne pourra être supérieure à 50%.

Titre IV.


Dommages causés aux biens mobiliers et immobiliers.

Art. 54.

Sont à indemniser comme dommages de guerre les destructions, détériorations, enlèvements ou pertes de biens mobiliers ou immobiliers par suite directe :

1° d'actes de guerre ou de l'occupation tels que

a) les actes de combat et les suites des mesures militaires en relation directe avec ces événements inclusivement l'enlèvement de la part des forces militaires ;

b) le vol, le pillage, la destruction ou la détérioration dans les régions évacuées, les réquisitions impayées, les dégâts ou dommages occasionnés dans les logements ou cantonnements ainsi que les pillages et enlèvements opérés par les troupes ou sur l'ordre de l'envahisseur ;

2° de l'évacuation;

3° de la déportation ou de l'emprisonnement pour motifs politiques ;

4° de l'engagement volontaire dans les armées et organisations paramilitaires alliées ;

5° de l'engagement forcé dans le service militaire ou paramilitaire ennemi ou de l'astreinte au travail (Dienstverpflichtung) à l'étranger ;

6° de la fuite ou de la disparition dans la clandestinité devant les mesures de rigueur de l'occupant, lorsqu'elles constituaient le seul moyen pour le sinistré d'éviter un danger imminent pour sa vie ou sa liberté ;

7° du départ de tous ceux qui pour des raisons d'Etat et en service commandé ont quitté le pays.

Sont également à indemniser les dommages survenus même en dehors du territoire du Grand-Duché aux bateaux appartenant à des personnes qui remplissent les conditions générales prévues par la présente loi pour bénéficier de l'indemnisation des dommages de guerre.

Art. 55.

L'indemnisation ne porte que sur les biens dont le remplacement sert au rééquipement économique et social du sinistré.

L'indemnisation n'a pas lieu ;

1° si la restitution, la reconstitution ou la réparation de ces biens est assurée utilement par d'autres voies de recours :

2° si l'ensemble des dommages éprouvés aux biens mobiliers et immobiliers ne comporte pas un montant total supérieur à 3.000 francs, valeur au 10 mai 1940, dès que l'impétrant est dans une situation aisée, telle qu'elle sera déterminée par un arrêté grand-ducal. Cette disposition n'est pas applicable aux catégories de bénéficiaires faisant l'objet du titre II de la présente loi.

Les cessions de l'or, de devises, de titres et papiers de valeur faites à l'occupant conformément aux prescriptions édictées par lui, ainsi que les réquisitions payées, ne donnent pas lieu à dédommagement.

Art. 56.

Le dédommagement des biens mobiliers ou immobiliers par destination aura lieu sur la base du prix de rachat d'objets équivalents en utilité et des frais normaux de réparation au jour de la décision du Ministre des Dommages de Guerre, sans que toutefois ces prix et frais puissent dépasser le coefficient de 2,5 par rapport à ceux au 10 mai 1940.

La moins-value réelle de ces objets, notamment par suite de leur usage, usure, vétusté ou de leur dépréciation technique et économique sera défalquée de l'indemnité.

Art. 57.

Le sinistré auquel l'Office des Séquestres a remis des biens meubles appartenant à des ressortissants ennemis ou à des personnes poursuivies pour infraction à la sûretéextérieure de l'Etat, peut, non obstant toute mainlevée de séquestre, opter dans un délai de trois mois à partir de l'entrée en vigueur de la présente loi pour l'acquisition de ces biens, en quel cas leur valeur sera imputée sur la créance de dommages de guerre du sinistré et attribuée comme prix de cession à qui de droit.

Art. 58.

Les objets de luxe ou de spéculation, tels que métaux précieux, bijoux, perles fines, fourrures, tapis, dentelles, statues, tableaux et autres, les collections d'objets d'art et d'objets rares et précieux, les collections de timbres, les provisions de vins et de liqueurs ne donnent pas lieu à indemnisation.

Toutefois les objets visés à l'alinéa précédent sont sujets à dédommagement au profit des personnes exerçant la profession de les produire pour autrui ou d'en faire le commerce, en tant qu'ils étaient destinés à ces fins.

Art. 59.

La perte d'un titre de créance à elle seule ne confère aucun droit à indemnisation à moins que le créancier ne rapporte la preuve que la perte du titre a entraîné la perte de sa créance.

Le débiteur, qui a payé à un organisme de l'occupant et est obligé d'effectuer un second paiement à son véritable créancier, peut réclamer comme dommage de guerre la restitution du paiement inopérant, conformément aux taux de conversion applicables à la contre-valeur de ce paiement en vertu des arrêtés en vigueur concernant l'échange monétaire, à charge par lui de prouver qu'il a payé de bonne foi et sous l'empire de la violence, s'il remplit en outre dans sa personne les conditions requises pour bénéficier de la présente loi.

Les comptes-espèces transférés à un organisme de l'occupant par l'Office des chèques postaux, les notaires, la Caisse d'Epargne, les banques et autres établissements de crédit seront rétablis auprès du débiteur originaire et à charge de l'Office des Dommages de guerre conformément aux taux de conversion et suivant les modalités prévus par les arrêtés en vigueur concernant l'échange monétaire. Les intérêts à bonifier sont ceux qui seraient redus, si le transfert n'avait pas eu lieu. L'Office des Dommages de guerre fera le remboursement avec les mêmes intérêts jusqu'au jour du rétablissement du compte.

Art. 60.

La perte de titres négociables ne sera prise en considération qu'après qu'il a été établi que le propriétaire ne saurait plus utilement recevoir satisfaction.

La perte subie par le sinistré sera remboursée sur la base du prix des titres au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi.

La perte de titres ennemis ne sera pas dédommagée.

Si un titre a été revendiqué conformément aux dispositions de l'arrêté grand-ducal du 22 avril 1941 relatif aux mesures de dépossession effectuées par l'ennemi, celui qui a restitué le titre peut obtenir une indemnisation de l'Office des Dommages de Guerre sous les conditions suivantes :

1) l'acquisition du titre doit avoir été faite de bonne foi ;

2) l'acquéreur doit être habile à bénéficier de la présente loi ;

3) l'indemnisation a lieu jusqu'à concurrence du prix d'acquisition. Si le prix a été payé en Reichsmark, l'indemnisation se fera conformément aux taux de conversion et suivant les modalités prévus par les arrêtés en vigueur concernant l'échange monétaire.

Si la revendication a pour objet un titre vendu à une bourse étrangère et que le propriétaire originaire spolié ait dû, conformément à la législation du pays où la vente s'est faite, rembourser à l'acquéreur le prix que le titre a coûté à ce dernier, le propriétaire originaire pourra demander à être indemnisé jusqu'à concurrence du montant du remboursement.

L'indemnisation pour les cas des articles 59 et 60, à l'exception de ceux visés à l'alinéa 3 de l'article 59, se fera en obligations de l'Etat.

Art. 61.

Les dommages causés aux marchandises en cours de transport ou les marchandises perdues ne donnent lieu à indemnisation que si d'après la loi luxembourgeoise elles voyageaient aux risques et périls du sinistré luxembourgeois et que le sinistre ait eu lieu dans le Grand-Duché. Si cet endroit ne peut pas être établi avec certitude par l'intéressé, le sinistre est réputé être arrivé au lieu du départ de la marchandise.

Les dommages causés aux vignes et vergers, pépinières et plantations, cultures horticoles et assimilées ouvrent droit à une indemnité égale aux frais de repeuplement et de reconstitution; ceux causés aux bois et forêts donnent droit à la valeur vénale des éléments sinistrés, au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Les dommages causés aux fruits pendants par branches ou par racines dans les six semaines précédant l'époque ordinaire de leur maturité, seront indemnisés d'après leur prix au jour du sinistre, conformément à des barèmes forfaitaires à établir par arrêté grand-ducal.

Art. 62.

En cas de destruction d'un immeuble, il sera reconstruit au même endroit un immeuble d'une destination semblable de même qualité, surface et volume, sauf décision contraire du Ministre des Dommages de Guerre.

Cette reconstruction sera faite aux frais de l'Office des Dommages de guerre, soit par le Ministre de la Reconstruction, soit, sous sa surveillance, obligatoirement, par le sinistré lui-même. En ce dernier cas, l'indemnité à affecter aux travaux de reconstruction sera calculée forfaitairement sur la base de la valeur du dommage au 10 mai 1940 majorée des coefficients normaux de renchérissement à fixer par règlement d'administration publique, compte tenu des conditions particulières et de l'époque de la reconstruction.

La plus-value que présente l'immeuble construit par le Ministre de la Reconstruction par suite de la disparition de la vétusté, de la modernisation ou de la nature des matériaux de construction employés restera à la charge du sinistré. En cas de reconstruction par le sinistré lui-même la vétusté donnera lieu à des abattements sur l'indemnité de base.

Art. 63.

Pour les immeubles ou parties d'immeubles à destination d'habitation privée, le Ministre des Dommages de Guerre avancera, à la demande des sinistrés, les sommes nécessaires pour couvrir le montant de la plus-value en tantqu'elle résulte exclusivement de la disparition de la vétusté, ou, en cas de reconstruction par le sinistré lui-même, le montant de la dépense supplémentaire à assumer par lui du chef de l'abattement pour vétusté, à la condition que le propriétaire sinistré ne soit pas imposable au titre de l'impôt extraordinaire sur le capital créé par la loi du 8 juillet 1946 pour un patrimoine net supérieur à 200.000 francs, déduction faite de tous abattements pour charges de famille. Exceptionnellement, en cas d'insuffisance de ressources du sinstré, l'avance pourra même comprendre l'excédent du coût de la reconstruction d'une maison, répondant aux exigences les plus simples d'une habitation, sur la valeur de la maison d'habitation sinistrée, insalubre ou caduque.

Les demandes d'admission à ce régime spécial doivent être présentées par les sinistrés avant le commencement des travaux ou, si l'immeuble a été déjà reconstruit ou est en voie de reconstruction, dans les 3 mois de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Ces avances sont remboursables à l'Etat par annuités pendant un délai maximum de 30 ans aux conditions à déterminer par un règlement d'administration publique qui fixera le taux d'intérêt et pourra prévoir des dégrèvements en cas de rigueur dûment constatés.

Ces avances deviendront exigibles en totalité:

1° si, endéans les trente années à partir de sa reconstruction, le dit immeuble cesse d'être habité principalement par le propriétaire sinistré ou par un de ses descendants ou ascendants ;

2° si, dans le même délai, l'immeuble reconstruit sort de la propriété du sinistré ou de ses héritiers en ligne directe.

Mention de ces charges sera faite dans l'inscription à prendre en vertu de l'article 68 ciaprès.

Art. 64.

Aucune autorité ne pourra prescrire la reconstruction dans un autre endroit ou dans une autre localité soit avec des dimensions plus grandes ou d'après des conceptions plus modernes, soit avec des matériaux plus coûteux qu'après avoir obtenu l'accord préalable du Ministre des Dommages de guerre. Les frais dereconstruction plus élevés occasionnés par les mesures exceptionnelles préénumérées ne seront pas à charge du sinistré, à moins qu'il ne s'agisse d'une augmentation de volume et de revenu pour le sinistré; dans ce cas le Ministre des Dommages de Guerre pourra décider que les frais sont en tout ou en partie à charge du sinistré suivant des normes à établir par un règlement d'administration publique.

Le Ministre des Dommages de Guerre prendra à sa charge la perte du sauvetage résultant des prescriptions d'alignement en matière de grande voirie.

Dens les alignements de la voirie vicinale il la supportera proportionnellement à son degré d'utilité publique générale et ce jusqu'au maximum de 60%. Le surplus de l'indemnisation incombera à l'autorité locale.

Si le nouvel emplacement choisi par le Ministère de la Reconstruction est d'une moinsvalue notable pour le sinistré, un accord sur le montant de l'indemnité éventuelle pour la moinsvalue devra intervenir avant le commencement des travaux.

Art. 65.

Si le Ministre des Dommages de Guerre autorise, sur la demande du sinistré et de l'assentiment du Ministre de la Reconstruction ou sur l'initiative de ce dernier, le dédommagement en espèces ou en obligations d'Etat d'un immeuble sinistré, l'indemnité correspondra au prix normal de vente de cet immeuble, au moment de la susdite autorisation. Le dédommagement se fera d'après l'état dans lequel il se trouvait au moment du sinistre. Sauf convention contraire entre parties il sera fait abstraction du prix de l'emplacement qui restera la propriété du sinistré.

Art. 66.

Si le sinistré a décidé, après avoir obtenu l'accord du Ministre de la Reconstruction ainsi que celui du Ministre des Dommages de Guerre, de reconstruire son immeuble dans un autre endroit ou dans une autre localité, soit avec des dimensions différentes ou des matériaux de construction plus coûteux, il prendra à sa charge la différence du prix normal de la reconstruction de l'immeuble sinistré et du prix du nouvel immeuble.

Art. 67.

Les immeubles endommagés seront remis dans leur précédent état. Les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 62 trouveront leur application par analogie. Si après l'exécution de ces réparations par les soins du Ministre de la Reconstruction l'immeuble a une plus-value pour le sinistré, ce dernier sera débiteur de cette plus-value vis-à-vis du Ministère des Dommages de Guerre. Par contre il sera indemnisé au prorata de la moins-value notable qui subsistera après l'exécution des travaux.

Art. 68.

Les indemnités en espèces et en obligations de l'Etat allouées au propriétaire de l'immeuble sinistré, en vertu des articles qui précèdent sont affectées, s'il y a lieu, aux créanciers privilégiés et hypothécaires suivant leur rang.

Les créances de l'Etat du chef des sommes avancées pour couvrir les frais de reconstruction immobilière laissés à charge du sinistré en vertu des dispositions du présent titre sont remboursables sur première demande et portent des intérêts au taux légal au profit de l'Etat à partir du premier du mois qui suit l'accomplissement des travaux, sauf le régime spécial des avances faisant l'objet de l'article 63.

Le privilège prend rang avant tous autres privilèges et hypothèques, inscrits ou non inscrits, à la seule exception du privilège des frais de justice. L'exercice de ce privilège ne peut être entravé par aucune action en nullité, révocation, rescision, résolution ou folle enchère pouvant affecter le droit de propriété du sinistré.

La radiation des inscriptions prises en vertu du présent article aura lieu sur réquisition écrite du Ministre des Dommages de Guerre ou de son délégué, sans qu'il soit besoin d'y constater le paiement des causes de l'inscription.

L'immeuble endommagé de 75% au moins reconstruit ou construit sur une autre assiette ne peut, pendant un délai de 10 ans, après l'achèvement des travaux, être ni aliéné entre vifs, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, ni saisi ni hypothéqué, sauf autorisation du Ministre des Dommages de guerre. Ce délai est porté à 30 ans pour les immeubles bénéficiant du régime spécial créé par l'art. 63. Cette indisponibilité n'est opposable aux tiers qu'à partir d'une transcription à opérer par le Ministre des Dommages de guerre au bureau de la conservation des hypothèques de la situation de l'immeuble. Les modalités de cette transcription et les conditions de sa radiation feront l'objet d'un arrêté grand-ducal.

Art. 69.

Les droits réels existant sur l'immeuble sinistré sont transportés sur l'immeuble de remplacement. Si l'immeuble est construit sur un autre terrain, les privilèges et hypothèques non dispensés de la formalité de l'inscription, existant sur l'immeuble sinistré, sont inscrits à la diligence du Ministre des Dommages de Guerre sur le nouvel immeuble et y prendront leur rang antérieur, mais après ceux grevant déjà le dit immeuble.

A la suite de la nouvelle inscription faite par le Ministre des Dommages de Guerre, le conservateur des hypothèques rayera d'office, mais, le cas échéant, seulement pour l'immeuble sinistré, les inscriptions des privilèges et hypothèques grevant cet immeuble, à l'exception de celles ayant pour objet des privilèges et hypothèques généraux. Dans son bordereau d'inscription le Ministre indiquera d'une façon précise la nature et la situation de l'immeuble sinistré ainsi queles dates, volumes et numéros des inscriptions à rayer d'office par le conservateur.

Les inscriptions et radiations dont s'agit, qui sont dispensées des droits de timbre et d'hypothèque, ne pourront être requises par le Ministre des Dommages de Guerre ou son délégué qu'après avoir obtenu le consentement des créanciers intéressés, consentement dont il n'aura toutefois pas à justifier au conservateur. En cas de dissentiment la partie la plus diligente se pourvoira en référé.

Art. 70.

Le Ministre des Dommages de Guerre prend à sa charge les mesures urgentes ou conservatoires ainsi que les travaux de déblaiement et d'arasement ordonnés ou autorisés par le Ministère de la Reconstruction. Les matériaux provenant des immeubles détruits et des installations d'immeubles par destination deviennent la propriété de l'Etat.

Art. 71.

Le Gouvernement est autorisé à tenir partiellement en suspens le paiement de l'indemnité en tenant compte tant de la situation de fortune des sinistrés que de l'importance du sinistre. Les montants à tenir en suspens sont fixés par règlement d'administration publique.

Mandons et ordonnons que la présente loi soit insérée au Mémorial pour être exécutée et observée par tous ceux que la chose concerne.

Luxembourg, le 25 février 1950.


Le Ministre des Dommages de Guerre,

Alphonse Osch.

Le Ministre des Finances,

Pierre Dupong.

Le Ministre de la Justice,

Eugène Schaus.

Le Ministre de la Reconstruction,

Robert Schaffner.

Charlotte.