Arrêté grand-ducal du 6 novembre 1944 modifiant et complétant les arrêtés grand-ducaux des 14 juillet 1943, concernant les crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat et 4 septembre 1944, relatif à la sécurité et à la protection des armées alliées sur le territoire du Grand-Duché.
Nous CHARLOTTE, par la grâce de Dieu, Grande-Duchesse de Luxembourg, Duchesse de Nassau, etc., etc., etc.;
Vu l'arrêté Grand-ducal du 14 juillet 1943 modifiant les dispositions du Code pénal concernant les crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat;
Vu l'arrêté grand-ducal du 4 septembre 1944 relatif à la sécurité et à la protection des années alliées sur le territoire du Grand-Duché;
Vu l'arrêté grand-ducal du 14 juin 1944, modifiant l'organisation judiciaire, afin de rendre possible, dès la libération du territoire, la reprise de la justice;
Vu l'arrêté grand-ducal du 26 juillet 1944, concernant l'état de siège;
Considérant qu'il est indispensable d'instituer pour la poursuite des crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat et contre la sécurité des armées alliées une procédure simplifiée et expéditive;
Considérant qu'il est indispensable de faire rétroagir au 10 mai 1940 les dispositions de l'arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943 pour certains crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat particulièrement odieux;
Considérant qu'il est indiqué de laisser aux juges une plus grande latitude pour l'application des peines prévues par l'arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943 concernant la sûreté extérieure de l'Etat;
Considérant que dans les cas où l'application de la peine de mort pour crime contre la sûreté de l'Etat devient indispensable; il convient d'adapter le mode d'exécution au caractère complexe du crime en question;
Considérant qu'en vertu du caractère d'urgence des mesures envisagées il y a impossibilité de recourir à la procédure législative normale;
Vu l'article 27 de la loi du 16 janvier 1866 sur l'organisation du Conseil d'Etat et considérant qu'il y a urgence;
Sur le rapport et après délibération du Gouvernement en Conseil;
Avons arrêté et arrêtons:
Art. 1er.
Les crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat, prévus par les articles 113- 123 du Code pénal, modifiés par l'arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943, de même que les crimes et délits contre la sécurité des armées alliées sur le territoire du Grand-Duché, prévus par l'arrêté grand-ducal du 4 septembre 1944, sont instruits et jugés d'après les règles de procédure admises en matière de délits, même pour les infractions commises dans le passé et qu'elle que soit la qualité des auteurs, coauteurs et complices.
Si d'autres crimes concourent avec des crimes contre la sûreté extérieure de l'Etat ou avec des crimes contre la sécurité des armées alliées sur le territoire du Grand-Duché, ils sont instruits et jugés suivant la même procédure.
Le tribunal correctionnel et la Cour d'appel, statuant en matière d'infractions aux dispositions des arrêtés grand-ducaux des 14 juillet 1943 el 4 septembre 1944, siègeront au nombre de 5 juges, dont 2 assesseurs laïques à choisir parmi les citoyens ayant fait preuve d'activité patriotique durant l'occupation ennemie, dont l'un est désigné par le Président de la Cour et l'autre choisi par le Gouvernement sur la proposition du Ministre de la Justice sur une liste de 12 noms présentée par l'union des Mouvements de résistance.
Avant d'entrer en fonctions les assesseurs, qui sont renouvelables périodiquement, prêteront entre les mains du président le serment suivant:
Je jure de remplir mes fonctions avec impartialité et de garder le secret des délibérations, ainsi Dieu me soit en aide.
«
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Les indemnités revenant aux assesseurs sont fixées par le Ministre de la Justice.
Art. 2.
Les articles 121 bis, 122, 123ter du Code pénal, modifié par l'arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943, rétroagissent au 10 mai 1940.
Art. 3.
Par dérogation aux articles 80 et 81 du Code pénal, les juges pourront, dans l'appli cation de circonstances atténuantes aux crimes des articles 113-123 du Code pénal, descendre, dans des hypothèses ertrêmement favorables, de la peine de mort jusqu'à la réclusion, de la détention perpétuelle et des travaux forcés à perpétuité à un emprisonnement de 3 ans au moins, de la détention et des travaux forcés de 15 à 20 ans à un emprisonnement de 2 ans au moins, de la détention et des travaux forcés de 10 à 15 ans à un emprisonnement d'un an au moins.
L'article 123ter, dernier alinéa, du Code pénal, modifié par arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943, concernant les crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'Etat, est abrogé.
Art. 4.
L'article 122, alinéa 1 du Code pénal, modifié par arrêté grand-ducal du 14 juillet 1943 est rectifié en ce sens qu'il s'agit des peines portées non par le Chap. II mais par le Chap. III du titre IX du Code pénal.
Art. 5.
Par dérogation à l'article 8 du Code pénal tout condamné à mort pour crime contre la sûreté de l'Etat sera fusillé.
Art. 6.
L'article 50 de la loi du 18 février 1885 sur l'organisation judiciaire, tel qu'il a été modifié par l'arrêté grand-ducal du 14 juin 1944, est abrogé.
Art. 7.
L'article 5 de l'arrêté grand-ducal du 26 juillet 1944, concernant l'état de siège est abrogé.
Art. 8.
Notre Ministre de la Justice est chargé de l'exécution du présent arrêté qui entrera en vigueur le jour de sa publication au Mémorial.
Le Ministre d'Etat, Président du Gouvernement, P. Dupong.
Le Ministre des Affaires Etrangères, Jos. Bech.
Le Ministre du Travail, P. Krier.
Le Ministre de la Justice, V. Bodson. |
Londres, le 6 novembre 1944. Charlotte. |